ISBN 978-2-918156-00-0, 11 x 17 cm, 98 p., 11 euros
Lire un extrait
Publié en 1899 et jamais réédité depuis, l’ouvrage sur Les Lois scélérates de 1893-1894 que nous publions ici analyse en trois textes l’esprit de ces lois d’abord, la manière dont elles furent adoptées et finalement imposées par le gouvernement ensuite, et enfin les condamnations auxquelles elles donnèrent lieu. Reprenant les faits eux-mêmes de l’histoire de ces lois, ces textes mettent clairement en lumière la façon dont le pouvoir politique et juridique a profité de la menace anarchiste pour promulguer et appliquer des lois destinées à réprimer toute contestation révolutionnaire, au mépris des principes fondamentaux de la République et de l’État de droit.
En nous montrant ainsi dans le détail comment un gouvernement élu peut exploiter l’émotion suscitée par certains événements pour se doter de lois liberticides, ce livre constitue aussi une dénonciation rigoureuse des manipulations et abus du pouvoir face à l’opposition politique et à la société civile. Une leçon précieuse en ce début de XXIe siècle, où la « lutte contre le terrorisme » et la « sécurité des citoyens » sont devenues les arguments inespérés des gouvernements occidentaux pour renforcer le contrôle des citoyens au mépris des libertés individuelles.
Francis de Pressensé, l’auteur du premier texte du volume, Notre loi des Suspects, est un journaliste et homme politique socialiste qui mena une campagne active en faveur de la révision du procès du capitaine Dreyfus (la France était en effet, au moment de la parution de ce texte, en pleine affaire Dreyfus). Il fut aussi l’un des initiateurs, avec Jean Jaurès, de la loi sur la séparation de l’Église et de l’État, et présida de 1904 à 1914, année de sa mort, la toute jeune Ligue des droits de l’Homme.
Le deuxième texte, intitulé Comment elles ont été faites, est anonymement signé « un juriste ».
Émile Pouget est l’auteur du troisième texte, L’application des lois d’exception de 1893-1894. Acteur incontournable du syndicalisme français, il participa à la création, en 1879, du premier syndicat d’employés à Paris. Il œuvra aussi comme propagandiste et pamphlétaire anarchiste, en particulier à travers ses journaux Le Père peinard puis La Sociale, et contribua comme secrétaire adjoint à la CGT à la parution de La Voix du Peuple.
Ce qu’en dit la presse
Le Matricule des anges, n°101 (mars 2009)
« Confronté au terrorisme fin-de-siècle, le gouvernement français fit adopter dans l’urgence trois lois, bientôt nommées scélérates : elles visaient directement la presse et les séditions anarchistes. Les éditions le flibustier rééditent plusieurs textes d’opposition, regroupés une première fois par La Revue blanche en 1899 : « Notre loi des suspects », étude générale et éloquente du journaliste et homme politique Francis de Pressensé, « Comment elles ont été faites », compte rendu minutieux rédigé par un juriste anonyme, et enfin « L’application des lois », récit des condamnations successives sous la plume du syndicaliste Emile Pouget. De l’Histoire lointaine, pour spécialistes only ? Voire : il est par exemple question, dans l’étude de Pressensé, d’une population qui « paye les frais d’une sécurité menteuse », du « monopole politique d’une bourgeoisie aussi égoïste et moins décorative que l’ancienne noblesse », de « la corruption croissante d’une société asservie au capitalisme », d’un régime qui « s’abaisse à chercher d’une main fébrile (…) les armes à deux tranchants de la peine forte et dure », d’un « Président parvenu qui joue au souverain », d’un « Premier ministre sournoisement brutal »… On se prend à jouer au jeu des sept différences, sauf qu’il n’y a pas de différence. » G. M.